Au Calvaire de Plougonven
Dédié à la mémoire de Yann Larhantec
Poème tiré du recueil
"Les Pétales flétris" de Jean-François SAINT-JALM (1894-1940)
Tiens bon au vent, mon vieux calvaire !
Brave les ans, brave les sots...
De passage, les "Parigots"
Longtemps admireront la pierre.
Longtemps encor, les deux grand bras
De ton Christ de souche bretonne,
Sous le ciel bas et monotone,
Etendront leur grand geste las !
...Mais jamais ne rira Satan
D'un rire vraiment satanique
Non loin de la marche où saint Jean
Fuit son rêve apocalyptique !
Car pur chef d'oeuvre bas-breton
Qu'un tissu d'ans couvre en patine,
" En sa robe de Kersanton,
Ton diable a la meilleure mine" !
Et s'il est comme on est chez nous
Quand l'ébriété nous étrille,
C'est qu'il a, dans notre famille,
Goûté le "flip" de cidre doux !
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Douloureuse est la Mère en larmes,
Près du Dieu qui, d'elle, naquit
- Et qu'elle a connu tout petit...-
Aujourd'hui cerclé de gens d'armes !
Non loin de là, Marthe et Marie,
Que le tournant de Belphagé
Surprenait, le soir, à guetter
Ses pas sur le sable qui crie !
Au seuil du tombeau qui s'entr'ouve
Comme une aurore au nouveau jour,
Qui cueillera les pleurs d'amour
De leurs yeux que la main recouvre !
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Je vois deux larrons - pas très beaux.
Le bon, celui-là, se confesse....
L'autre insulte et crache sans cesse
Sur son Maître...et crache un peu haut !
Grâciateurs des Barabbas,
Serviteurs des Ponce-Pilate,
Haine aveugle "graissant la patte"
De l'Iscariote au front bas.
Gens du pays, gens respectables
Bonnes soeurs, moines prosternés,
Faces qui dans un peu de sable,
Incrustez votre éternité,
Chaos où tu t'agites,
Foule en délire, ne vois tu pas
Que, devant ce bois de trépas,
C'est tout un Monde qui s'écroule ?
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Au front mystique de l'Epoux.
Qui mit l'auréole de flamme ?
Quel ouvrier fût vraiment l'âme
Eparse au sein de ces cailloux ?
Qu'importe !
Mais l'un, dont l'humeur fière
Fuyait chicane et pots-de vin,
Fut un enfant de Plougonven :
"Yann Larhantec, tailleur de pierre" !
Il paya le commun écot
Que doit l'artiste à son génie :
Avec son nom que l'on oublie,
Il dut, sans autre maladie,
Mourir de faim à Landerneau !
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Ps: Plougonven est la commune qui m'a vu naître.
Les différences de couleurs dans les photos proviennent uniquement de l'heure des prises de vues; le lever du soleil nous offre les plus lumineuses... le soleil à son zénith, nous
terni l'autre partie !